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FCF-Rétrovision 3
9 novembre 2009

Un nouveau nid pour l'Aronde

Paul Hyttick était fou de rage en raccrochant son téléphone. Il fulminait à n’en plus pouvoir. Il était au bord de l’apoplexie. S’il ne se calmait pas tout de suite il courait à la crise cardiaque ou à l’infarctus. De toute manière cela reviendrait au même. Aussi prit-il la décision de se rasseoir.  A l’annonce de la nouvelle, il n’avait fait qu’un bond de son siège et avait violemment reposé le combiné sur son socle. Maintenant il avait les deux poings posés sur le bureau qu’il martelait avec force.

_ Mauricette ! Criat-il.

_ Oui, Patron, j’arrive…

_ Appelez moi Mar...

_ Mais que vous arrive-t-il Patron ?  Z’êtes tout rouge !

_ Appelez-moi Marcel !

_ Mais vous z’appelez pas Paul ?

_ Faites pas l’andouille… C’est pas le moment… J’ vous dis de m’appeler Marcel !

_ ???

_ Ben le maire de Cernés.

_Ah, oui...  M. Libas ?

_ C’est ça, Marcel Libas…

_De suite, Patron.

_ … A son magasin. Eut-il juste le temps de préciser alors que sa secrétaire quittait le bureau en trottinant.

_ … Allo ! Paul ?

_ Oui Marcel !

_ Que puis-je pour ton service ?

_ Rien mais c’est au Maire de Cernés que je voudrais parler.

_ D’accord. Attends une seconde, je change de combiné. Lui répondit Marcel Libas avant de quitter le magasin d’électro ménager qu’il gère dans le rue Centrale et gagner son bureau à l’arrière de l’immeuble. J’y suis. Le Maire de Cernés t’écoute.

_ J’ai une mauvaise nouvelle à t’annoncer, lui lança tout de go Paul Hyttick qui commençait à s’énerver à nouveau.

_ Qui est ?

_ Qu’on m’a refusé la concession Simca !

_ Hein ?!?

_ Et oui, ces abrutis de Poissy m’ont jeté comme un malpropre. Z’ont pas voulu me donner le panonceau.

_ Et alors ?

_ Alors ? … Ben, mon projet de m’agrandir et de m’installer chez toi, du coup il tombe à l’eau !

_ Bah ! T’en fais pas pour la commune nous avons déjà quelqu’un pour te rem…

_ QUOI ???? T’as déjà quelqu’un !

_ oui

_ Perdez pas vot’ temps vous autres.

_ Oh ! Calme toi un peu tu veux bien ? La commune y est pour rien. Ça fait des mois que …

_ Que quoi !!!

_ Ben, qu’on est en contact avec le futur concession…

De rage, Paul Hyttick avait raccroché, ne voulant pas en entendre davantage. Il avait été doublé. Il s’écroula dans son fauteuil et tenta de se calmer.

Pour comprendre la situation, il nous faut revenir quelques mois en arrière.

Il y avait longtemps que le projet d’un secteur réservé aux entreprises était dans les cartons du maire de Cernés. Mais je devrais plutôt écrire les projets car s’il(s) avai(en)t germé dans la tête des élus de Cernés, il en était de même dans celles de ceux de Ménoies sous Vairges. Réserver une partie du territoire de la commune où les entreprises pourraient s’installer sans déranger les habitants du village. Les mettre loin des habitations. Les élus de Cernés eurent l’idée de la projeter en limite de Ménoies et ceux de Ménoies en limite de Cernés. De fait leur(s) projet(s) se situai(en)t au confluent du Rubi-Consai et de l’Ondine Obeur.

Comme toujours, les projets les plus secrets sont les premiers connus si bien qu’un jour les maires des deux communes se réunirent pour discuter d’un projet commun. C’est ainsi qu’une entente vit le jour pour arrêter le périmètre de ce secteur et fixer les conditions d’un pacte de non concurrence et s’entendre sur les conditions de son aménagement. Et puis quelqu’un lança l’idée de lui donner un nom. Que n’avait-il pas dit ?

Ce fut pire qu’à Clochemerle. Au point que les deux conseils municipaux menacèrent à tour de rôle de démissionner en bloc si le nom qu’il proposait n’était pas accepté par l’autre. Il fallut désigner une commission de conciliation parce que des pressions étaient apparues de la part d’entreprises intéressées de s’implanter sur le canton. Certains avaient sentis le fromage et en voulait un morceau. De préférence le meilleur et, si possible, le plus gros.

Ce n’est qu’après d’âpres discussions mais aussi de pots vidés qu’un accord se fit jour sur le nom de cette zone, ce serait la zone d’entreprises du Cernois, condensé de Cernés et de Mesnoies.

Mais il y avait un hic. Les terrains ne leur appartenaient pas, mais au sieur Anlon qui vivait au Tonkin, comme on disait encore à l’époque. Lorsqu’il décéda, Maître Liéhaire, son notaire en informa les élus.

Trois ans plus tard, le temps de régler la succession – faut dire que M° Lambrouille, en sa qualité d’avocat d’un des héritiers, était passé par là et avait justifié très largement son patronyme – les terrains devinrent la propriété des deux communes.

Le premier chantier fut la construction d’un pont sur l’Ondine Obeur pour desservir la zone, mais sur Cernés ou sur Mesnoies ? Chaque commune le voulait chez l’autre, pour ne pas avoir à le payer. La chicane reprenait le dessus. Foin d’arbitre ce coup ci. Ce fut un tirage à la courte paille qui décida de qui aurait à construire le pont construire. Ce fut à Mesnoies sous Vairges de s’y coller, en amont du confluent, là où l’Ondine était la plus large !…  Merci pour les impôts locaux !!!

Puis vinrent les travaux de viabilisation des lots et leur commercialisation. Et contrairement à leurs attentes, les acheteurs potentiels ne se bousculèrent plus. Loin sans faut. Faut dire à la décharge des acheteurs potentiels que les exigences des communes dépassaient l’entendement. Et les contribuables locaux de supporter l’achat des terrains et leur viabilisation.

Prêt à la vente dès fin 1952, aucun des 17 lots ne trouva preneur avant l’automne 1955.

Jusqu’au jour où se présenta Norbert d’Aure (1) en vue d’y implanter une concession Simca, chose que Paul Hyttick n’était pas parvenu à obtenir sur Cernés le Vieux et projetait sur Cernés.

Mais qui de Cernés ou de Mesnoies, serait la première à vendre une parcelle de terrain ? Trop contents d’avoir enfin un acheteur, les deux maires se livrèrent à de folles enchères pour tenter d’arracher la vente. Mais la bataille était déséquilibrée, Cernés disposant de plus de ressources.

De guerre lasse, le Maire de Mesnoies sous Vairges finit par jeter l’éponge, soulagé au fond de lui, de ne pas avoir à présenter à son conseil municipal l’ensemble des prétentions auxquelles devrait faire face celui de Cernés.  Et c’est vrai que Marcel Libas,  eut beaucoup de mal à convaincre ses collègues d’accéder à certaines demandes émanant de Norbert d’Aure : lui construire le bâtiment et le lui louer pendant 30 ans, après quoi il en deviendrait propriétaire. Mais la transaction put aboutir.

C’est ainsi qu’il nous est permis aujourd’hui, grâce aux Feuilles défraîchies, les archives de la Feuille de Choux Farcie, de découvrir ces photos prises de cette nouvelle concession Simca que Norbert d’Aure inaugurera aux premiers beaux jours, le printemps suivant.

_(1) Norbert Oscar Honoré Lingo d’Aure-Embart, pour l’état civil

3_207_GR01_Garage_Simca

3_207_GR02_Garage_Simca

3_207_GR03_Garage_Simca


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